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viernes, marzo 29, 2019

Poésie Française: Hymne à la Beauté

Charles Baudelaire
Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme,
Ô Beauté ! ton regard, infernal et divin,
Verse confusément le bienfait et le crime,
Et l'on peut pour cela te comparer au vin.

Tu contiens dans ton oeil le couchant et l'aurore ;
Tu répands des parfums comme un soir orageux ;
Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore
Qui font le héros lâche et l'enfant courageux.

Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres ?
Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien ;
Tu sèmes au hasard la joie et les désastres,
Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.

Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques ;
De tes bijoux l'Horreur n'est pas le moins charmant,
Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques,
Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement.

L'éphémère ébloui vole vers toi, chandelle,
Crépite, flambe et dit : Bénissons ce flambeau !
L'amoureux pantelant incliné sur sa belle
A l'air d'un moribond caressant son tombeau.

Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe,
Ô Beauté ! monstre énorme, effrayant, ingénu !
Si ton oeil, ton souris, ton pied, m'ouvrent la porte
D'un Infini que j'aime et n'ai jamais connu ?

De Satan ou de Dieu, qu'importe ? Ange ou Sirène,
Qu'importe, si tu rends, - fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine ! -
L'univers moins hideux et les instants moins lourds ?

Charles Baudelaire, "Les Fleurs du Mal", 1857

lunes, marzo 25, 2019

Poésie Française: "Ce Qui Dure"

Sully Prudhomme

Le présent se fait vide et triste, 
Ô mon amie, autour de nous ; 
Combien peu de passé subsiste ! 
Et ceux qui restent changent tous.

Nous ne voyons plus sans envie 

Les yeux de vingt ans resplendir, 
Et combien sont déjà sans vie 
Des yeux qui nous ont vus grandir !

Que de jeunesse emporte l'heure, 

Qui n'en rapporte jamais rien ! 
Pourtant quelque chose demeure : 
Je t'aime avec mon cœur ancien,

Mon vrai cœur, celui qui s'attache 

Et souffre depuis qu'il est né, 
Mon cœur d'enfant, le cœur sans tache 
Que ma mère m'avait donné ;

Ce cœur où plus rien ne pénètre, 

D'où plus rien désormais ne sort ; 
Je t'aime avec ce que mon être 
A de plus fort contre la mort ;

Et, s'il peut braver la mort même, 

Si le meilleur de l'homme est tel 
Que rien n'en périsse, je t'aime 
Avec ce que j'ai d'immortel.

René-François Sully Prudhomme

"Les vaines tendresses" (1875).